XVIIème Session – Partie 2 – Chapitre 11 : La Culture

PARTIE 2 : LES DÉFIS DE LA FRANCE DU 21ème SIÈCLE 

CHAPITRE 11 : LA CULTURE

L’influence d’un pays dans le monde ne se mesure pas seulement à la force de son économie, à sa puissance politique et stratégique, à sa place dans les institutions de gouvernance internationale. Elle repose aussi sur la capacité de séduction de ses idées, de ses savoirs, de sa culture et sur leur articulation avec les autres facteurs de puissance. Alors que la France a été le berceau d’artistes et d’intellectuels célèbres qui ont, à leur façon, façonné le monde dans lequel nous vivons, il est devenu habituel d’évoquer le déclin supposé de notre pays et singulièrement l’affaiblissement de son influence à l’étranger.

Or la diplomatie culturelle, certes difficile à définir, est pourtant d’une importance cruciale pour un pays à l’histoire culturelle aussi forte: influencer, séduire, instruire, convaincre, diffuser un modèle, créer un climat de confiance voire d’intimité, construire et nourrir des relations durables et profondes, partager une vision du monde, se faire mieux que des alliés : des amis, voilà la richesse et le potentiel de la diplomatie culturelle. Et pour la France, c’est une part de son destin dans le concert des Nations des Monde qu’elle met en jeu à cet égard. « La France n’a jamais été plus grande que lorsqu’elle était la France pour les autres » disait Malraux en 1966. Rien n’a changé aujourd’hui.
La compétition mondiale ne porte en effet aujourd’hui plus uniquement sur les ressources et les territoires, mais aussi sur la capacité à innover, à faire valoir des concepts et des idées, à partager une vision du monde, qui s’exprime aussi par la création artistique, les usages linguistiques et les échanges culturels et universitaires. En novembre 2007, un article de Donald Morrison paru dans l’édition européenne du magazine Time annonçait « la mort de la culture française ». Dix ans plus tard, la France occupe la première place du classement Softpower publié par l’Institut Portland pour son engagement en faveur de la multipolarité et l’universalité de son réseau diplomatique et culturel. Ainsi, l’influence internationale de la France apparaît sans commune mesure avec son poids économique ou démographique. Néanmoins, dans le contexte global où nous évoluons, la concurrence est plus intense et le prestige culturel de la France diminue. Il faut voir dans ce phénomène non pas un déclin mais une forme de normalisation, la fin d’une rente de situation pour la culture française. N’est-ce pas une chance? Celle de montrer que la France peut encore écrire l’histoire et lutter ainsi contre la muséification de son image et de sa culture.

Savoir faire à la fois prospérer un héritage et incarner la modernité.

Certes, la France dispose encore d’une aura culturelle et politique, mais est-elle encore valorisée suffisamment? Il y a sans doute un travail à entreprendre pour accroître la visibilité des créateurs français et communiquer autour de la « marque France » autour d’un réseau culturel dense – 1500 implantations aux statuts divers (lycées, centres et instituts culturels et de recherche, alliances françaises, etc.) qui en fait le plus étendu au monde.
Le succès d’une telle initiative ne saurait dépendre que de l’État d’autant plus que ses moyens s’érodent comme le décrit un rapport publié par la Cour des comptes en 2012 « en dépit de ses efforts pour accroître des ressources extra budgétaires de 290 millions d’euros, le réseau culturel reste confronté à une érosion de ses moyens de financement ». Quant à son dynamisme artistique, porté par 50000 manifestations annuelles, le même rapport conclut que « ce foisonnement masque une grande variété d’audience et d’impact, au demeurant trop peu mesurée ».
Dès lors, ne serait-il pas grand temps de s’affranchir d’une politique culturelle par trop inféodée aux organismes étatiques? Et de ce fait mobiliser davantage les énergies et les mettre au service des artistes, des professionnels de l’art, des organismes professionnels, des instituts et des fondations privés, qui sont autant de relais vivants et dynamiques prêts à défendre la « marque France » et l’exception culturelle française à l’international? C’est précisément la démarche que mène par exemple depuis près de 60 ans le Comité Colbert, qui fédère 75 maisons de luxe et 13 instituts culturels : œuvrer au rayonnement international de l’art de vivre français, conçu comme partie intégrante de la culture française. En mettant en avant le savoir-faire et l’esprit français des grandes maisons qui le soutiennent, cet organisme indépendant participe au rayonnement culturel, et de facto économique, de la France à travers le monde bien plus efficacement que des instituts qui n’ont que leur légitimité étatique à faire valoir, faute de réels moyens.

Le Rôle international de la langue française

Le français fut jadis la langue la plus prestigieuse du monde occidental, parlé par les élites et les religieux, avant d’être progressivement supplanté par l’anglais qui tend aujourd’hui à s’imposer comme un mode de communication international quasi hégémonique. La langue française offre ainsi l’illustration du « paradoxe français »: une influence potentielle mais rarement exploitée à sa juste valeur.
La promotion du français, parfaitement illustré par Albert Camus qui rappelait lors de son discours de réception au Prix Nobel de Littérature le 10 décembre 1957 que « Ma patrie, c’est la langue française » joue un rôle décisif dans la pérennité de notre culture, tout comme la promotion des langues régionales garantit à nos provinces la préservation de leur caractère et de leurs spécificités. Avec la mise en place, le 1er janvier 2011, de l’Institut français, la France a donné un nouvel élan à sa politique culturelle extérieure. L’une de ses principales missions, partagée avec les lycées français à l’étranger et les alliances françaises, est d’assurer la promotion et la diffusion de la langue française. Deuxième langue étrangère enseignée dans le monde après l’anglais – les deux seules langues à être pratiquées sur tous les continents –, la France a voulu constituer un trait d’union entre les pays ayant le français en partage. Le français rassemble aujourd’hui 116 millions d’apprenants, dont un million d’élèves dans les instituts et alliances français. C’est la colonne vertébrale de notre offre d’enseignement à travers le monde.
Toutes les langues luttent pour conquérir ou conserver une prééminence dans la pratique. Car la langue est le premier de nos patrimoines, un bien très précieux qu’on doit faire fructifier. Elle résonne par sa littérature, par sa poésie, par la chanson, le théâtre, le cinéma, par l’art culinaire, le sport, le débat philosophique ou l’éloquence. En France comme ailleurs, les facteurs décisifs de l’évolution de la langue, de sa diffusion, de son influence furent, sont et seront de deux natures: politico-économique et culturelle, le « prince » et le « poète ». Le français grâce à ces dynamiques couplées, s’est progressivement émancipé de la France, il est devenu cette langue monde, une langue « archipel » car si d’autres langues se parlent dans des continents immenses avec un poids démographique supérieur, il est peu de langues qui se parlent dans cet « archipel » monde.

Parler le français, l’écrire, c’est entrer dans une immense communauté d’expériences et de regards et il est de la responsabilité de la France de faire vivre la Francophonie. Non pas comme un faux-nez d’un empire colonial perdu, mais pour faire perdurer le destin d’une langue, dans ce qu’elle véhicule, dans ce qu’elle dit du monde.
Une grande partie de ce défi se joue bien à travers le numérique. Le français y est d’ailleurs la quatrième langue et les livres en français occupent la troisième place des ventes sur Amazon. Mais la Francophonie doit affirmer plus clairement ses atouts et le combat sur les plateformes, les réseaux sociaux doit être à la fois politique et culturel. Les universités francophones peuvent ainsi être un bon levier de diffusion avec la mise en ligne des contenus académiques et des ressources pour la recherche et l’enseignement en Français. Le défi de la langue française est aussi médiatique. La France a la chance de pouvoir s’appuyer sur une institution puissante, France Médias Monde qui touche près de 135 millions de personnes chaque jour. L’ambition peut-elle être rehaussée ? Le défi est aussi celui de la production littéraire par le décloisonnement des milieux de l’édition francophone pour favoriser les cessions de droits du français vers le français. Partout hors de France où on veut lire en français, il y a des questions de cession de droits, il y a des problèmes de prix du livre pour accéder aux livres en français? Ne faudrait-il donc pas travailler pour résoudre ce problème? C’est en ouvrant les marchés respectifs de l’édition aux littératures en français dans toute leur pluralité qu’il sera rendu possible de former un grand ensemble de langue française.
C’est avec cette conscience des défis qui attend la langue française que le Président Emmanuel Macron a souhaité lui donner un nouvel « écrin ». Le Château de Villers-Cotterêts – où le roi de France François 1er signait en août 1539 la fameuse « ordonnance de Villers-Cotterêts » qui impose l’usage du français pour tous les textes officiels et juridiques – s’apprête ainsi à devenir en 2022, après trois ans de rénovation la « Cité internationale de la langue française ».
Longtemps la France a rayonné à travers le monde par sa langue, sa diplomatie, ses arts et sa culture, renforçant son influence par l’image qu’elle renvoyait aux autres nations. Ce soft power, qui ne portait alors pas encore ce nom, s’est affaibli avec le temps, bousculé par une mondialisation qui a redistribué les cartes entre grandes puissances. Il y a là une raison de plus pour ne pas négliger notre diplomatie culturelle, à condition de ne plus l’envisager sous son seul aspect étatique. Le monde culturel a changé; le modèle d’une diffusion à sens unique du centre vers les marges a disparu; le marché de la culture s’est mondialisé. La révolution numérique a bouleversé les pratiques et les modes de production artistiques; de nouveaux publics, en priorité la jeunesse, se sont éloignés de la culture et de la langue française. Les attentes de nos partenaires ont également changé et la France a perdu le bénéfice d’une rente de situation avec la montée en puissance des pays émergents. Enfin, les moyens financiers et humains sont soumis à la règle de réduction des dépenses publiques.

L’appropriation par les Français de leur culture.

À l’instar d’Annah Arendt qui rappelait dans la Crise de la Culture en 1954 qu’« Une personne cultivée devrait être quelqu’un qui sait choisir ses compagnons parmi les hommes, les choses, les pensées dans le présent comme dans le passé », si les nations sont protégées par des frontières, ce sont leurs cultures qui en font le liant, car les nations sont à la fois histoire, réalité et projet. La culture serait ainsi un préalable essentiel à l’ouverture. En effet, pour aller vers l’autre, ne faut-il pas être soi-même constitué? Pour partager, n’est-il pas nécessaire d’être à la fois singulier et conscient de l’existence d’un commun? Pour récréer un sentiment d’appartenance et d’affection, la culture française offre sans aucun doute un levier unique si tant est qu’elle puisse être définie tant elle est, par nature, mouvante et soumise aux inflexions idéologiques du temps.
Les pratiques culturelles en France ont évolué au cours des dernières décennies et seront amenées à se transformer encore davantage peut-être lors du siècle qui vient. C’est là une véritable opportunité. À travers une enquête réalisée auprès de 9200 personnes âgées de 15 ans et plus, entre février 2018 et mars 2019 pour le ministère de la Culture, Loup Wolff et Philippe Lombardo ont pu constater que la société française est de plus en plus culturelle. De nouvelles manières de créer, d’apprécier et de consommer la culture s’y développent. Les domaines autrefois réservés aux milieux aisés et diplômés comme la musique ou le cinéma se sont démocratisés pour attirer au quotidien des publics larges, de milieux sociaux, de lieux et d’âges divers. Toutefois, bien davantage que les politiques publiques, c’est l’essor du numérique qui semble avoir fait l’essentiel de cette démocratisation, comme il a fait l’essentiel de la réduction des inégalités territoriales. Le confinement a accéléré ce mouvement de transition vers une consommation culturelle de plus en plus numérique.
Comment mieux répondre aux attentes des jeunes publics? Quelle stratégie numérique adopter dans les années à venir? Quelles priorités géographiques se donner? Comment mieux accompagner nos industries culturelles et créatives dans leur expansion internationale ? Comment trouver un équilibre entre intervention publique et logique de marché?
Cette transformation, qui au premier abord semble élargir l’accès à l’offre culturelle, pourrait-elle représenter un risque pour la qualité des pratiques culturelles et la transmission d’un patrimoine commun? Selon l’étude, s’il existe un fort appétit culturel chez les jeunes générations, il semble pourtant s’exprimer aux dépens de la culture patrimoniale, marginalisée par ces mêmes jeunes : ils lisent moins, écoutent moins de musique classique, vont moins au théâtre et se détournent des formes de productions moins accessibles et plus exigeantes, posant ainsi la question de leur survie même. Dans un contexte où les industries numériques privées – avec leur recherche inhérente de profit – remplacent progressivement les institutions publiques, se pose la question de la légitimité de ces institutions censées jouer un rôle d’intermédiaire et préserver la diversité des expressions. Peut-il dès lors exister une légitimation institutionnelle des Arts? Sur quelle base peut-elle se fonder lorsque la popularité des œuvres dans le monde numérique prend le pas sur la notion de qualité qui est censée primer dans l’univers classique? Comment créer une symbiose avec le secteur privé qui occupe une place de plus en plus grande dans le milieu culturel?
Au-delà de la seule production culturelle, il peut être pertinent de s’interroger sur l’impact de cette transformation en cours sur notre identité collective. Ces nouvelles pratiques sont-elles un risque pour la cohésion nationale, sachant qu’elles renforcent la pratique individuelle au détriment des cadres traditionnels ? Les nouveaux outils sont-ils des instruments efficaces de construction d’un imaginaire commun, comme ont pu l’être la littérature ou le théâtre? En effet, nous ne sommes pas neutres, encore moins indéterminés. Or la culture est un patrimoine immatériel à transmettre, qui donne accès au temps, à ses œuvres. Elle n’est ni distraction, ni prétention ou injonction sociale mais exigence. Elle peut s’adapter mais elle doit surtout transmettre identité et curiosité, une compréhension de tout ce qu’il y a à explorer dans la pensée comme dans le monde. Cette segmentation des pratiques culturelles pourrait se rapprocher de ce que Jérôme Fourquet caractérise comme L’Archipel Français, c’est-à-dire une société en mouvement, consciente des transformations en cours mais qui les appréhende séparément, affectée par une sorte d’archipélisation entre groupes sociaux et territoires? Les nouvelles formes de culture accentueraient-elles alors la séparation des groupes au lieu de les rassembler? Comment pourrait-il être possible de faire société avec une aussi grande diversité d’approches? Quel dénominateur commun peut-on retrouver, sans briser la liberté individuelle en matière de culture? Comment la puissance publique peut-elle faire en sorte que les espaces numériques s’organisent dans le sens de l’intérêt général alors qu’il existe une demande sociale forte de moderniser les grands repères de notre civilisation, de les reconsidérer à la lumière des enjeux de société actuels ? Comment reconstruire un récit intelligible et partagé par tous et qui puisse être une source d’épanouissement ?

L’ART DE VIVRE À LA FRANÇAISE AU PATRIMOINE IMMATÉRIEL MONDIAL

On résume souvent l’art de vivre à la française comme, l’art de savoir quoi et comment boire et manger, ce qui est vrai et réducteur à la fois. Quoi qu’il en soit, classée au patrimoine culturel immatériel de l’UNESCO, la gastronomie française tire sa renommée des nombreux chefs qui ont su exporter leur savoir-faire à l’étranger. Pâtisseries, viennoiseries, recettes traditionnelles, vins d’exceptions et curiosités culinaires sachant que chaque région possède ses propres spécialités alimentaires et viticoles. De surcroit, s’il y a bien un domaine dans lequel la France s’est illustrée à travers le globe, c’est donc cet art autour de la réception, associé au savoir-vivre, qui a progressivement rendu les Français fiers de cette distinction mondiale. Notre tradition culinaire et gastronomique est célèbre dans le monde entier mais les arts de la table occupent une place de choix jusque dans les foyers populaires. « Bien manger » et « bien boire » témoignent d’une sophistication du quotidien qui s’est démocratisée au point de s’étendre à toutes les couches de la société et de définir un véritable modèle de civilisation. L’art culinaire français reste donc toujours un « modèle ». Dans la plupart des grandes écoles hôtelières du monde, on apprend le « modèle français » qui reste un canon pour nombre de cuisines et de services à travers le monde, associé aux grandes marques de luxes françaises qui perpétuent cette tradition de la confection de services d’exception. Naturellement, cette tradition se perpétue dans le « savoir recevoir », l’hôtellerie à la française, qui reste une référence mondiale et perpétuée par des écoles autant françaises qu’étrangères aujourd’hui. En cela, l’art de vivre à la française est sans doute l’une des valeurs nationales les plus universalisées et transmises par un patrimoine vivant de « savoirs » et de « faires » impressionnants.
Car l’art de vivre français est aussi l’artisanat d’art, les entreprises du patrimoine vivant, c’est l’expression du génie créatif français et de la culture du pays car les liens étroits entre savoir-faire et culture ne doivent rien au hasard. Les entreprises qui s’illustrent dans le secteur de l’art de vivre, souvent depuis très longtemps et de manière aussi diverse qu’exceptionnelle, ont construit l’identité à la fois plurielle et unique de la marque France. Ces « maisons », selon l’expression consacrée, qui constituent un véritable réseau d’excellence, sont les héritières depuis plusieurs générations et même parfois depuis plusieurs siècles, de savoir-faire rares, ce qui ne les empêche pas de faire preuve d’une créativité et d’un sens de l’innovation remarquables. Ce sont ces qualités qui leur ont permis de rester au premier rang mondial. Car le « romantisme » français, aurait depuis longtemps disparu s’il n’avait pas su s’adapter aux goûts, aux techniques, aux exigences du monde moderne.
Le respect de la beauté, la recherche du raffinement et de l’excellence apparaissent comme des éléments essentiels de l’identité française. Pour la France, le luxe, symbole de « l’art de vivre », constitue l’une de ses principales forces dans l’économie mondiale. Alors que sa balance commerciale est largement déficitaire (- 62,3 milliards d’euros en 2018) (28), plusieurs marchés du luxe s’imposent comme des piliers français à l’export. Pour preuve, les neuf entreprises françaises présentes dans le top 100 des plus gros acteurs du luxe dans le monde concentrent à elles seules 24,3 % des ventes mondiales (29). En 2018, le marché mondial des produits de luxe était estimé entre 276 et 281 milliards d’euros, en nette croissance par rapport à 2017 (30). Un marché de poids, donc, sur lequel la France se hisse en tête du classement. Le luxe est même l’une des principales forces du pays dans le jeu du commerce mondial. Cette domination se retrouve aussi du côté de la rentalibilité financière, où les plus importants groupes français du luxe, La Maison Hermès, LVMH, le groupe Kering à travers ses marques, présentent des résultats sans précédent. Au total, et au sens strict, le luxe représente 165000 emplois ; en englobant l’ensemble de la filière hôtellerie et mode, il faut compter plus de 900000 emplois directs et 1600000 d’emplois indirects en France. (31)
Les maisons, comme les ambassadeurs de la gastronomie française, sont dans leurs domaines respectifs, les garantes du patrimoine français vivant. Un patrimoine qui évolue jour après jour, se réinvente en puisant dans les forces de son passé, tout en en se voulant résolument moderne et innovant, car vivant. La qualité, la création, l’innovation sont donc les maîtres mots pour des entreprises et des institutions dont les créations, souvent rares et uniques, sont le reflet de la richesse, de la diversité et du savoir-faire du raffinement français. C’est pourtant cet art de vivre qui a été le plus durement touché par la crise que nous traversons. La gastronomie, l’hospitalité, la diffusion de notre richesse viticole et la mise en valeur des produits du terroir à l’international sont directement impactées, ce qui menace la préservation même de cette diversité des savoir-faire. Comment mettre en valeur un art de vivre à la française, quand le confinement ne permet plus de défendre et d’illustrer une réputation si chèrement acquise ? Comment demain retrouver la force de rayonner à l’étranger en réinventant ses modes de production et de diffusion?
Si l’art de vivre à la française a résisté durant des siècles, il ne peut pas s’éteindre avec cette pandémie. Il est de notre responsabilité collective en revanche de le soutenir, de le promouvoir et de réfléchir à sa valorisation dans un monde qui se transforme. Il y a une façon de se sublimer pour un peuple qui s’appelle le génie. Partageons à nouveau l’art d’être français, croyons en celui-ci, soyons fiers d’en être comme Henry James était fier de l’écrire : « Vous pouvez tout reprocher aux Français, leur vanité, leur orgueil, leur arrogance, mais il est une chose que vous ne pouvez pas leur refuser, c’est leur entente certaine de la vie! »